11 mars
Je reprends ici, avec son autorisation, un article que Pascale Perrier vient de publier sur son site.
Triste anniversaire : il y a cinq ans, un tremblement de terre causait un tsunami au Nord-Est du Japon, qui provoquait lui-même une catastrophe nucléaire à Fukushima.
C'était le 11 mars 2011.
Nous venions de publier, Pascale Perrier et moi, Tchernobyl, bienvenue en enfer. Le thème du nucléaire était aussi abordé. D'ailleurs, toujours à l'affût de nouveautés, France 2 m'a demandé de parler de cette première catastrophe au cours du journal télévisé le 12 mars (ou comment être catapulté spécialiste de ce qu'on n'est pas). Bref.
On suivait l'info, sous le choc.
Le 15 mars, j'ai reçu un appel de Françoise Hessel, éditrice chez Oskar Editeur.
- Il faut raconter ce qui est en train de se passer au Japon. C'est une telle catastrophe qu'il faut tout raconter !
- Maintenant ? Mais on ignore comment les choses vont évoluer.
A ce moment-là, l'accident nucléaire et le tsunami faisaient le "buzz". On se posait de nombreuses questions. Certains allaient jusqu'à dire que le Japon disparaîtrait, rayé de la carte des zones habitables.
Françoise a insisté ; il lui paraissait fondamental de faire paraître un livre rapidement.
Pascale et moi avons donc longuement réfléchi : peut-on parler de l'actualité "à chaud" dans une fiction ? N'est-ce pas opportuniste et mal venu ?
Et puis nous avons réalisé que, si l'actualité faisait la part belle au Japon dans la semaine qui suivait l'accident, les caméras ne tarderaient pas à se détourner de Fukushima rapidement. Or rien ne serait terminé. L'exemple de Tchernobyl et de son fameux nuage qui avait miraculeusement évité les frontières françaises était encore dans nos mémoires...
On voyait chacune nos propres enfants sidérés par ce que racontaient la radio, la TV, par les images. On a pris conscience qu’il fallait accompagner les jeunes, les aider à comprendre, à assimiler.
Donc oui, il était important d'aborder la question.
Et puis nous ne partions pas de rien : notre roman sur Tchernobyl venait de sortir donc nos connaissances sur le nucléaire étaient encore fraîches. On pouvait utiliser les mêmes personnages, en les adaptant.
Nouveau coup de téléphone.
- Oui Françoise, on va écrire ce livre.
- Très bien. Rendez-moi votre texte en juin, vous avez deux - trois mois pour l'écrire. j'aimerais qu'il paraisse en septembre.
Gloups. Délais hyper serrés et angoisse qui monte.
Comment écrit-on, quand il est impossible (et pour cause) de prendre du recul, quand on découvre jour après jour ce qui se passe, au gré de ce que les médias ou les communicants acceptent de laisser filtrer ?
Comment écrit-on quand on est englué dans les infos contradictoires et qu'on est à des milliers de kilomètres ? Et quand, de surcroît, les infos scientifiques et techniques sont très complexes ?
Notre premier travail a été une veille documentaire très précise. Des pages et des pages d'informations, celles que distillaient les journaux, les pro comme les anti nucléaires. Celles de spécialistes comme celle de témoins. Et en lien avec une Franco-japonaise qui habite Tokyo depuis 30 ans. Cette masse d'informations a permis de nous nourrir.
Il fallait maintenant savoir comment écrire. Après réflexion, nous avons choisi la forme du journal.
La jeune héroïne raconte ce qu'elle sait, au moment où elle le sait. Tout comme nous, Européens impuissants. L'information tombe, se contredit, s'emmêle. Pouvoir des médias, mensonges et vérités.
Un journal sur le mois qui suit la catastrophe.
30 jours pour se faire une idée de ce qui se passe.
30 jours pour aider l'amie japonaise qui débarque en France.
30 jours pour trembler à propos du père, journaliste qui couvre la catastrophe.
Pari réussi ? A vous de nous le dire. Quoi qu'il en soit, il est important de connaître le contexte dans lequel le livre s'est écrit. Aujourd'hui, il ne prendrait évidemment pas la même forme...
Mais cinq ans après, l'info a toujours du mal à émerger. De ce point de vue, rien ne change... Puissions-nous impulser à nos dirigeants la foi nécessaire à l'intérêt collectif. Voir plus loin pour soigner notre planète.